Nadirah Nazeer, entrepreneure internationale : «En 2021, le Canada a attiré plus de 400 000 immigrants»

Depuis 2021, on observe une petite vague migratoire de Mauriciens vers le Canada. Bien que ce pays ait toujours attiré nos compatriotes, la COVID-19 semble avoir accéléré cette tendance chez des personnes aspirant à des jours meilleurs. Pourquoi un tel attrait pour ce pays à l’hiver rugueux ? Pour y répondre, Le Défi Quotidien a sollicité Nadirah Nazeer, une Mauricienne établie au Canada depuis 1990.
Comment expliquez-vous l’engouement des Mauriciens depuis 2021 pour le Canada, incluant même ceux qui ont un bon travail à Maurice ?
Je suis arrivée au Canada en 1990 quand je me suis mariée. C’est pour cela que je suis venue ici. Je suis maintenant divorcée et heureuse. Je dois dire que j’aime ce pays en raison des opportunités qu’il m’a offertes. En tant que mère célibataire divorcée, j’ai pu accomplir tout ce que je voulais faire ici.
J’ai eu le privilège d’élever trois jeunes hommes extraordinaires – mes fils – et de poursuivre divers intérêts caritatifs et commerciaux, qu’il s’agisse d’être membre du conseil d’administration de Zonta International ou d’avoir une émission de télévision. Toutes ces opportunités se sont présentées alors que cela faisait 24 ans que je travaillais dans le monde de l’entreprise, atteignant progressivement un poste de direction dans une société faisant partie du classement Fortune Global 500.
Le voyage que j’ai entrepris n’aurait pu avoir lieu qu’au Canada, un pays qui repose sur la méritocratie et l’égalité. Je pense que c’est ce « rêve canadien » qui attire les gens de Maurice et d’autres pays du monde.
Vous avez la nationalité canadienne. Dites-nous comment vous avez pu vous intégrer dans ce pays ?
Le Canada m’a offert de nombreuses opportunités dont certaines filles et femmes dans le monde ne peuvent que rêver. C’est un endroit où une femme divorcée, immigrée de l’île Maurice, peut se faire une très bonne vie. Il y a beaucoup d’opportunités.
Il est clair qu’il faut travailler très dur et qu’il y a beaucoup de sacrifices à faire. Mais si vous travaillez dur et que vous faites les sacrifices nécessaires, vous pourrez tout accomplir dans ce pays. C’est l’approche que j’ai adoptée depuis mon arrivée.
De plus, je crois fermement qu’il est de notre devoir de redonner à nos communautés et de créer des opportunités, en particulier pour les femmes. Ainsi, ma participation à des organismes de bienfaisance, comme Halton Women’s Place et Zonta, m’a aidée à prendre une part active dans la communauté. Cela m’a aussi permis d’aider d’autres personnes en partageant mon expérience en tant que femme qui a dû lutter pour faire sa vie et celle de ses enfants ici.
Je me rends compte de l’importance de soutenir les autres pour leur montrer qu’il y a une lumière au bout du tunnel. Il est impérieux de leur montrer qu’avec du travail, de la persévérance, de la patience, des conseils ainsi qu’un bon réseau de soutien, et en donnant toujours en retour, on peut tout accomplir.
Ce pays est un bon endroit pour élever des enfants, pour aller à l’école, pour faire des études, pour se bâtir une carrière…»
Qu’est-ce qui permet l’intégration des étrangers au Canada ?
La force du Canada est sa diversité. De nombreuses personnes de nationalités différentes vivent ici et poursuivent le « rêve canadien ». Les possibilités sont infinies, pourvu que vous soyez prêt à travailler pour les saisir. De plus, s’engager dans le processus politique aide les gens à s’impliquer davantage dans les communautés dans lesquelles ils se sont installés.
En fin de compte, le gouvernement prend des décisions qui affectent leur vie. Je pense que nous devons encourager davantage de femmes à s’engager en politique afin que leur voix puisse être entendue et qu’elles puissent être la voix d’un changement positif.
Comment se présente la situation économique et sociale du Canada ?
Pour moi, le Canada est une grande tente qui accueille tout le monde et qui nous donne la possibilité de poursuivre nos rêves, tant dans le domaine des affaires que dans notre vie personnelle. Le tissu économique et social du Canada m’a permis, en tant que femme divorcée, d’accomplir une bonne carrière, de m’engager en politique, d’avoir ma propre émission de télévision et de faire beaucoup de travail caritatif. J’ai pu créer un solide réseau de soutien composé de personnes qui s’élèvent et se célèbrent mutuellement.
Je suis dans ce pays depuis 32 ans. Je n’avais que 17 ans quand je suis arrivée. J’en ai maintenant 49. Je suis une femme célibataire très heureuse qui va avoir 50 ans en octobre. Grâce aux possibilités qui me sont offertes au Canada, la vie pour moi à 50 ans ne fait que commencer.
Il y a tellement de choses qui peuvent être accomplies. Maintenant que mes enfants sont grands, j’ai beaucoup plus de liberté et d’indépendance pour accomplir plus de choses, comme le fait de me concentrer davantage sur la politique, les œuvres caritatives, l’émission de télévision et la carrière.
Le contraste que nous avons à Maurice, malheureusement, lorsque quelqu’un atteint la cinquantaine, il pense que la vie est terminée. Or, ce n’est absolument pas la bonne attitude. Vous pouvez toujours prendre soin de vous et vous assurer que vous êtes en bonne santé, que vous mangez sainement, que vous faites de l’exercice et que vous pouvez vous engager.
Vous n’avez pas besoin d’être une tante, vous n’avez pas besoin d’agir comme une grand-mère…Vous pouvez certainement continuer à avancer d’une manière saine et être un grand contributeur à la communauté et à votre famille.
Y a-t-il une vague migratoire au Canada en ce moment ?
En 2021, le Canada a dépassé son objectif en matière d’immigration, attirant plus de 400 000 nouveaux immigrants. Près de 50 % d’entre eux se sont installés en Ontario. En 2022, le Canada devrait, une fois de plus, accueillir plus de 400 000 nouveaux immigrants. Cela montre bien qu’il existe une raison impérieuse de vivre au Canada.
C’est un beau pays. C’est un grand pays qui a quatre belles saisons. C’est un bon endroit pour élever des enfants, pour aller à l’école et pour faire des études. Il offre également de nombreuses possibilités de se construire une très bonne vie.
Comment les Mauriciens vivent-ils au Canada ?
Les Mauriciens comme moi et ceux que je connais ici se sont très bien intégrés à la société canadienne. Les Canadiens et les Mauriciens sont naturellement amicaux et voisins. Cela rend la transition relativement facile pour les nouveaux immigrants.
Est-ce un pays qui permet l’expression de tous les cultes religieux ?
Au Canada, les gens sont libres de pratiquer leur religion sans discrimination ni persécution. Je suis musulmane et j’apprécie la possibilité de pratiquer mon culte de la manière qui me convient. J’ai la chance d’avoir dans mon réseau de nombreux amis de différentes nationalités et religions. La diversité du Canada est une force et aussi un facteur qui encourage les gens à vivre ici.
Qu’est-ce qui vous manque à l’île Maurice où vous êtes née ?
À part bien sûr ma famille élargie que je ne peux plus voir très souvent, je dirais que ce qui me manque le plus à Maurice, c’est notre climat exceptionnel et nos plages. Le Canada est un pays magnifique, mais il est difficile de profiter de l’hiver ici.
En arrivant au Canada, quels sont les comportements et les attitudes hérités de l’île Maurice que les Mauriciens devraient mettre de côté ?
Je ne pense pas que nous devrions préconiser de mettre de côté une partie de notre héritage mauricien. Je suis fière de mes origines et de nos traditions. Nous avons la possibilité de les intégrer aux traditions, au patrimoine et aux modes de vie canadiens. C’est le meilleur des deux mondes. Si nous sommes prêts à travailler dur et à faire les sacrifices nécessaires, nous pourrons tout accomplir dans ce pays.
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