Mahesh Doorgakant : «Le Global Business va continuer à croître»

Nous devons avoir suffisamment de réglementations pour garantir que Maurice conserve sa position de juridiction de bonne réputation. Tel est l’avis de Mahesh Doorgakant, président de l’Association of Trust & Management Companies (ATMC).
La Financial Services Commission (FSC) a publié un nouveau manuel sur le blanchiment d’argent au début de cette année. Selon vous, comment cela va-t-il aider à lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme ?
La lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est un travail continu. Les gens qui essaient de commettre de tels actes changent constamment de méthode, ainsi les lois et règlements doivent suivre. Les institutions internationales revoient régulièrement leurs actions et leurs règles. Il y a beaucoup de choses qui auraient été permises il y a 10 ou 20 ans, mais qui ne le sont plus de nos jours. Ainsi, la FSC est appelée à continuellement mettre à jour ses paramètres en vue de cette lutte et la publication de ce manuel va dans cette direction.
Croyez-vous que Maurice a un cadre légal solide pour lutter contre le blanchiment d’argent ?
Je pense que Maurice a pris plusieurs mesures importantes au cours de ces dernières années pour promulguer une législation qui a renforcé les efforts de prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme dans le pays, par exemple, la Financial Intelligence and Anti-Money Laundering Regulations 2018. Les régulateurs apportent continuellement des mises à jour progressives.
Le blanchiment d’argent n’est pas un délit qui a toujours trait à de l’argent liquide. Vos commentaires ?
C’est exact. Les contrevenants deviennent de plus en plus créatifs et, avec l’avancement de la technologie, ils utilisent des moyens et des chemins qui n’existaient pas auparavant.
Maurice demeure un centre financier pour les investisseurs étrangers qui veulent faire du business sur le continent africain. Se tourner vers l’Afrique est-elle notre unique voie de secours dans ce secteur ?
Comme Maurice fait partie de l’Afrique, il est naturel que nous nous positionnons pour être le centre d’excellence du continent dans le secteur financier. Aussi, nous ne devons pas oublier l’Inde qui reste un partenaire majeur. Notre but est d’avoir les compétences et les ressources pour pouvoir fournir des services financiers à un niveau et avec des standards internationaux. De par notre situation géographique, l’Afrique et l’Inde restent nos partenaires prioritaires, mais nous travaillons toujours pour nous rendre attractifs afin de miser sur d’autres marchés. Nous avons déjà du succès et nous sommes confiants de l’avenir de ce secteur.
Le plus gros problème est qu’il n’est pas facile pour les opérateurs de Fintech ou de Blockchain d’ouvrir des comptes bancaires.»
Où en sommes-nous concernant les lignes directrices sur la Blockchain et la Fintech ?
On a des lignes directrices pour comprendre quels éléments de la Blockchain ou de la Fintech sont autorisés par les législations actuelles du pays. Nous comprenons que la licence de services de dépositaires d’actifs numériques a attiré de nombreux candidats et que de nouveaux titulaires de licence dans ce domaine pourraient être accordés prochainement. Nous attendons également bientôt des directives sur le marché numérique. Si une demande ne respecte pas les directives et les réglementations en vigueur, alors la licence ‘Sand Box’ doit être envisagée. Il s’agit d’un nouveau domaine pour notre territoire et nous prévoyons que les résultats commenceront à apparaître dans un proche avenir.
Le pays se positionne comme un hub Fintech régional avec des structures propices pour l’épanouissement dans cette sphère. Qu’en est-il des défis?
La Fintech évolue à un rythme rapide. Cela se produit à l’échelle mondiale. Le défi est que nous devons avoir suffisamment de réglementations pour garantir que Maurice conserve sa position de juridiction de bonne réputation, tout en ne régulant pas trop le secteur, car cela pousserait les investisseurs vers d’autres juridictions. Le plus gros problème est qu’il n’est pas facile pour les opérateurs de Fintech ou de Blockchain d’ouvrir des comptes bancaires. Encore une fois, c’est un défi que nous voyons à l’échelle mondiale. Les régulateurs, les opérateurs et les banques devraient s’asseoir ensemble et trouver une solution à ce problème.
Comment se portera le secteur du Global Business cette année ?
Nous restons convaincus que ce secteur continuera de croître, mais il aura toujours de nouveaux défis. Le dernier en date concerne l’Inde. Nos régulateurs et dirigeants travaillent dur depuis des mois pour y trouver une solution et c’est urgent d’y arriver. Les notes positives des institutions internationales comme l’Union européenne, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Banque mondiale contribuent à réaffirmer la compétitivité de Maurice en tant que juridiction propice aux affaires tout en renforçant la confiance des investisseurs. De nouveaux projets comme le Special Purpose Fund et la mise en place d’un Family Office à Maurice vont permettre d’exploiter de nouveaux types d’entreprises financières. Nos clients actuels continueront de nous faire confiance et d’apporter plus d’affaires.
Le ‘global business’ ne doit plus se reposer sur les traités. Est-ce-que Maurice doit revoir son ‘business model’, afin d’offrir d’autres services et s’orienter vers d’autres marchés émergents ?
Je suis d’avis que les Double Tax Agreements (DTA) ont certainement aidé à faire des affaires à Maurice, mais ce ne sont pas les seules raisons de notre succès. Nous avons déjà adapté et revu notre modèle d’entreprise pour explorer de nouveaux domaines qui ne sont pas uniquement basés sur les DTA. Nous avons des ressources humaines qualifiées, une infrastructure technologique, une infrastructure juridique et d’autres avantages que nous offrons déjà pour dynamiser ce secteur.
Face à une rude concurrence, comment vendre le pays comme une juridiction fiable et réputée dans ce secteur?
Notre attractivité est basée sur plusieurs autres facteurs comme des cadres législatifs et réglementaires modernes qui sont transparents et flexibles, tout en exigeant la responsabilité. Nous avons un niveau élevé d’alphabétisation, produisant une main-d’œuvre capable et qualifiée comprenant des comptables et des avocats qualifiés. En sus, une politique d’immigration ouverte qui facilite la réinstallation des talents étrangers dans les cas où les compétences requises ne sont pas disponibles. On a la possibilité d’une double cotation des sociétés à la Bourse de Maurice (SEM) désignée comme la bourse reconnue par le Royaume-Uni. Comme vous le savez déjà, nous avons reçu plusieurs distinctions comme Mo Ibrahim pour la facilité de faire des affaires où Maurice se classe au premier rang en Afrique.
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